L'accordéoniste malgache mêle la tradition au jazz
Le chant envoûtant de Régis Gizavo



Photo Fred Tanneau.



























Dans le vaste panorama d'accordéonistes que nous présente le festival, Régis Gizavo est peut-être le plus difficile à classer. Venu de Madagascar, l'île de tous les métissages, il s'est forgé un style personnel qui mêle le jazz aux complaintes traditionnelles. Il a offert une soirée envoûtante au public du théâtre de Cornouaille mardi soir.

Le public de I Muvrini lundi soir a sans doute remarqué l'étonnant accordéoniste qui agrémentait les chants corses de vocalises jazzy et de grooves dignes d'un vieux bluesman. Régis Gizavo, fils d'un instituteur de Tuléar, à Madagascar, est arrivé en France en 1990 et s'est rapidement taillé une solide réputation d'accompagnateur : il a joué avec Manu Dibango, Geoffrey Oryema, Graeme Allwright, Higelin, les Têtes Brûlées, et bien d'autres groupes connus, avant de devenir l'accordéoniste attitré d'I Muvrini. Il apporte aux Corses une touche décalée, moderne, qui aère leurs chansons.

Mais Régis Gizavo ne se contente pas d'accompagner les autres, même s'il le fait avec beaucoup d'originalité. Créateur à part entière il a des choses à dire, notamment sur son île, ses habitants, les légendes qui la peuplent. "Pour moi, la voix est le premier des instruments, expliquait-il au public mardi soir, l'accordéon n'est là que pour l'accompagner". Et de fait, le public pourra constater que ce musicien hors pair est aussi un véritable chanteur, qui mêle dans un style très personnel des influences venues de son île natale, du jazz et du blues. Une musique métissée, qui ressemble à Madagascar, carrefour de l'Afrique, de l'Europe et de l'Asie.

Un duo pur trad

La première partie du concert de Gizavo a permis d'entendre les deux frères Bertrand, du marais breton, à la lisière de la Bretagne et de la Vendée. L'un a découvert la veuze dès le plus jeune âge et s'emploie depuis à faire renaître cette cornemuse qui avait été totalement abandonnée. L'autre joue du diatonique.
Les deux musiciens, accompagnés au violoncelle par Thierry Moreau (du groupe Cabestan), ont fait découvrir au public des airs provenant tous de collectages réalisés dans le marais breton de Vendée.

Outre ses qualités musicales évidentes, ce duo résume à lui tout seul la riche démarche des musiciens traditionnels d'aujourd'hui, à la fois collecteurs, historiens, sociologues de la musique, pédagogues (tous deux enseignent), et même facteurs d'instruments. A travers leur jeu, c'est toute une culture qui se développe, proche du peuple, attachée à la mémoire, à la fois savante et conviviale. Un modèle pour les nombreux passionnés qui ont assisté à ce concert.

 





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